Opéra
A l’Opéra Bastille, « La Veuve joyeuse », sur un air de danse

A l’Opéra Bastille, « La Veuve joyeuse », sur un air de danse

24 September 2017 | PAR Alexis Duval

Stupéfiante, virevoltante, désopilante, l’opérette signée Franz Lehar revient jusqu’au 21 octobre sur la scène de l’Opéra Bastille. Un spectacle total.

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Un nom qui sonne comme un programme. Une histoire de mœurs en avance sur son temps. Des personnages hauts en couleur. Une partition endiablée. La Veuve joyeuse, l’opérette la plus célèbre de l’Autrichien Franz Lehar (1870-1940), c’est tout cela, et bien plus encore. Mercredi 20 septembre, le public de l’Opéra Bastille, où est reprogrammée l’ébouriffante mise en scène de l’Argentin Jorge Lavelli – un succès depuis sa création parisienne  en 1997 au Palais Garnier et depuis son entrée à cette occasion au répertoire de l’Opéra de Paris -, a réservé le meilleur accueil aux formidables interprètes. L’idée de transposer l’argument dans un décor de cabaret a visiblement séduit.

Jouée pour la première fois à Vienne en 1905, La Veuve joyeuse est peut-être l’une des opérettes les plus internationales. Jugez plutôt : le livret est écrit à 95 % en allemand dans une Autriche-Hongrie décadente, la scène se passe à Paris et le personnage principal est une veuve originaire d’un pays fictif, le Pontevedro – on reconnaît aisément les sonorités du Monténégro, dont la faillite faisait l’objet de plaisanteries au début du XXe siècle. On ne s’étonnera pas que le très cosmopolite Ernst Lubitsch (1892-1947) en ait tiré une adaptation sur grand écran avec Maurice Chevalier et Jeanette McDonald : né à Berlin, le cinéaste a connu ses plus grands succès en tournant aux Etats-Unis, pays où il a émigré en 1922.

Stupéfiante, virevoltante, désopilante, l’opérette de Franz Lehar est un spectacle total. Et la musique comme la danse contribuent grandement à cette réussite. Sur des chorégraphies de Laurence Fanon, on passe de la polka à la valse en passant par la mazurka. Le numéro final, qui fait la part belle au cancan, est l’occasion d’un déploiement de figures acrobatiques parfaitement exécutées et a enivré une assistance hilare, qui a copieusement applaudi la troupe de danseurs, dont l’enthousiasme s’est révélé irrésistiblement contagieux.

Le troisième acte, rare moment d’allégresse

Un enthousiasme visiblement partagé par les interprètes lyriques et les musiciens. La direction musicale du chef allemand Marius Stieghorst a, de l’ouverture au final, frôlé la perfection. L’orchestre a sautillé, vrillé, valsé de concert avec la scène et comme fusionné durant les deux heures trente de spectacle. On en aurait presque demandé une deuxième ration ! Le troisième acte, en particulier, avec l’arrivée des grisettes – le bondissant « Trippel-trippel, trippel-trap » des coquettes et coquines Lolo, Dodo, Joujou, Cloclo, Margot, Froufrou – et la résolution des intrigues, est un rare moment de folie douce.

Et surtout, quel bonheur de voir Véronique Gens en Hannah Glawari, la fameuse Veuve joyeuse ! Le rôle de cette femme héritière de son défunt mari banquier et qui a quitté son pays pour gagner Paris afin de trouver un nouvel époux est, il faut dire, un régal. Mais du fait de nombreux récitatifs, il exige de son interprète une maîtrise parfaite du français et de l’allemand ainsi qu’une grande agilité vocale.

La géniale soprano, qu’on avait pu voir dans le rôle-titre de La Reine de Chypre de Fromental Halévy au Théâtre des Champs-Elysées au mois de juin, était toute désignée pour incarner avec verve et panache celle qui se voit souvent réduite à ses millions par les autres personnages. Le reste du casting est à l’avenant, du baryton américain Thomas Hampson, qui campe le comte Danilo, à son compatriote, le ténor Stephen Costello, en Camille de Rosillon, tous deux impeccables. On se souviendra longtemps de cette Veuve joyeuse, inoubliable et hilarante pépite.

La Veuve joyeuse, à l’Opéra Bastille jusqu’au 21 octobre. Renseignements sur le site de l’Opéra.

https://soundcloud.com/operadeparis/la-veuve-joyeuse-franz-lehar

Crédits photo : Guergana Damianova / OnP

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Alexis Duval

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