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La Belle Hélène à l’Opéra de Tours – Au plaisir des dieux – Compte-rendu

La Belle Hélène, coproduite avec les Opéras de Saint-Etienne, Metz et Toulon, referme avec bonheur l’année 2015 à Tours. La mise en scène animée et chorégraphique de Bernard Pisani (qui fut danseur) situe l’action dans un décor classique d’Eric Chevalier prenant pour référence les toiles d’Alma-Tadema, « peintre du marbre » influencé par l’Antiquité. Les costumes de Frédéric Pineau donnent une tonalité hollywoodienne à cette Grèce d’opérette qui se moque avec entrain d’elle-même. Sans jamais tomber dans l’anecdotique, quelques touches furtives rappellent l’actualité (le thème de Star Wars, finement suggéré, ou la situation économique grecque).
 

© François Berthon
 
Distribution exclusivement francophone où les chanteurs se montrent également comédiens et se lovent avec un plaisir non dissimulé dans le jeu parodique et le vaudeville. Karine Deshayes fait merveille en reine de Sparte voluptueuse, sensuelle, usant d’une voix capable de toutes les métamorphoses. Dans les scènes parlées, son abattage ferait presque concurrence à Jacqueline Maillan ! Boute-en-train, Antoine Normand occupe l’espace en roi Ménélas cocu mais moins niais qu’il n’y paraît. Il apporte une saveur toute particulière à son personnage, anime le plateau, et à sa diction parfaite s’ajoute une technique de chant contrôlée. Le Québécois Antonio Figueroa, Pâris séduisant, a du charme y compris dans le timbre et l’expression. Plus humain qu’impérial, l’Agamemnon de Ronan Nédélec contraste avec le Calchas très sûr et de belle prestance de Jean-Marc Salzmann (c’était une prise de rôle). L’Oreste d’Eugénie Danglade reste un peu en retrait à l’inverse du drôlissime couple des Ajax d’Yvan Rebeyrol et Jean-Philippe Corre. 
 
Dans cette version exhaustive (la scène du Jeu de l’oie, souvent omise, prend une dimension de grand opéra), l’interprétation souple et subtile de Jean-Yves Ossonce souligne avec élégance toute la richesse de la palette expressive d’Offenbach, servie par un Orchestre Symphonique Région Centre-Val de Loire/Tours d’une remarquable précision et des chœurs homogènes préparés par Iñaki Encina Oyón. Reprise trois fois en bis, l’incantation « Je suis gai, soyons gai » invite au plaisir partagé, à l’image d’une production vivifiante en ces temps si troublés. 
 
Michel Le Naour

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Offenbach : La Belle Hélène - Tours, Grand Théâtre, 31 décembre 2015
 
Photo © François Berthon

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