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L’Elixir d’amour de Donizetti à l’Opéra Royal de Wallonie-Liège - Commedia dell’arte au Far West – Compte rendu

Sergio Leone chez Donizetti, mais aussi Lucky Luke (avec un vrai cheval sur scène), les Dalton et d’autres références à la BD ou au cinéma, sans oublier le chien Guizmo (une véritable star qui obéit au doigt et à l’œil) : Stefano Mazzonis di Pralafera, a déplacé L’Elixir d’amour avec l’imagination qu’on lui connaît dans un Far West digne d’un western spaghetti. Tout le folklore d’un village américain de carton-pâte s’exprime dans les décors chatoyants de Jean-Guy Lecat, avec des soldats en garnison, les prostituées du saloon, un shérif féminin arme au poing et... une agitation digne de la commedia dell’arte à savourer au second degré. Une manière très originale de donner du corps au livret de Felice Romani qui en manque cruellement.
 

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Plateau subtilement dosé avec l’Adina de Maria Grazia Schiavo, très à l’aise dans ce rôle virtuose y compris dans les redoutables vocalises dont elle triomphe sans frémir. Théâtralement crédible, elle offre toute la gamme des états d’âme de l’indifférence simulée à la déclaration d’amour la plus spontanée. Un peu caricatural par sa naïveté appuyée, son amoureux, le Nemorino du jeune Davide Giusti, possède un timbre très prometteur qui se révèle au fur et à mesure de la représentation jusqu’au très attendu air « Una furtiva lagrima » où l’émotion affleure.
Incarnation haute en couleur d’Adrian Sampetrean en charlatan Dulcamara, apparaissant dans un char baroque et multipliant à l’envi les prouesses les plus hilarantes pour vendre un élixir qui se révèle être du vin de Bordeaux. Véritable basse-bouffe, il crève l’écran dans un costume volontairement ridicule dû à Fernand Ruiz. Plus en retrait, Laurent Kuba en Belcore ne possède pas la même assurance au niveau du chant, mais rend quand même à son personnage de militaire présomptueux et arrogant toute sa superbe. Moins exposée, Julie Bailly est une Giannetta pimpante et fraîche.
 
Spécialiste de ce répertoire, Bruno Campanella obtient des troupes de l’Orchestre de l’Opéra Royal spontanéité et sens de la pulsation belcantiste. Sous sa baguette experte, les musiciens se sentent confortés, les chanteurs soutenus et les chœurs en sécurité. Très bien préparés par Marcel Seminara (qui prendra sa retraite à la fin des représentations de L’Elixir et sera remplacé la saison prochaine par l’actuel chef des chœurs de l’Opéra de Marseille Pierre Iodice), ces derniers contribuent par leur homogénéité et leur engagement au succès de ce spectacle décoiffant qui atteint sa cible et convainc.
 
Michel Le Naour
 
Donizetti : L’Elisir d’amore - Liège, Opéra Royal de Wallonie, 25 juin, dernière représentation le 27 juin 2015 /
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