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Le retour d’Hoffmann en grande forme à l’Opéra de Liège

par Paul Fourier
04.12.2023

Alors que l’Opéra de Paris reprend la production de Robert Carsen à l’Opéra Bastille, celui de Liège nous permet de savourer celle de Stefano Poda avec un plateau d’élite et ce, dans une version musicale fort excitante. En fosse, Giampaolo Bisanti, à tout moment, fait briller la partition d’Offenbach.

Cet Hoffmann, quelle aventure !

 

S’il est un sublime opéra dont le récit, en 2023, est encore en construction, c’est bien la grande œuvre d’Offenbach, celle, ultime, qu’il eut, de refus en faillite, bien du mal à faire jouer… entreprise qu’il n’eut jamais le plaisir de mener à son terme.

 

Tout démarre en 1851, lorsque les auteurs dramatiques, Jules Barbier et Michel Carré présentent, sur la scène de l’Odéon, le drame éponyme, une « pièce fantastique en cinq actes, dont un prologue et un épilogue ».

Les aventures qui y sont narrées proviennent de multiples écrits d’Ernst Theodore Amadeus Hoffmann qui fut, si l’on résume à gros traits, bureaucrate le jour… et artiste alcoolique la nuit.

Walter Scott dit de lui qu’Hoffmann « était si près d’un état de folie qu’il tremblait devant les fantômes de ses ouvrages ». C’est dire ô combien ses personnages – ou leurs actions – issus de L’homme de sable, de L’automate, du Conseiller Crespel, du Magnétiseur, de L’aventure de la Saint-Sylvestre, de L’histoire héroïque du célèbre ministre Kleinzach, etc… avaient toute la puissance pour ensorceler Barbier, Carré, Offenbach… et le public depuis toujours !

 

Lors de la création de la pièce, Offenbach n’est alors pas encore le compositeur célébré, le « Mozart des Champs-Élysées », mais « seulement » le directeur musical de la Comédie-Française ; en 1851, il assiste à l’une des représentations de la pièce et s’en entiche.

C’est ensuite, vraisemblablement en 1873, que débute le travail d’ébauche entre Barbier (Carré étant décédé) et Offenbach.

L’on sait que le compositeur – pour lequel la genèse de l’opéra est d’une grande importance – s’attachera, durant plusieurs années, à peaufiner son chef d’œuvre, créant à l’occasion, plusieurs versions du même morceau (dont deux, de la chanson de Dapertutto (mais pas l’apocryphe « Scintille diamant »), trois, de l’entrée initiale de la muse, deux, des couplets de Nicklausse à l’acte II).

Sa rencontre avec la virtuose soprano Adèle Isaac l’amènera aussi à remanier la chanson d’Olympia (agrémentée de contre-mi bémol) et à composer un air alternatif de l’air que Giulietta utilise pour séduire Hoffmann.

Il ne se privera pas non plus de recycler quelques rares fragments de son propre catalogue, comme la célèbre Barcarolle qui émane de son opéra Les Fées du Rhin (1864).

Au-delà, il serait, dès lors, bien long (voire impossible) de résumer ici les différents épisodes touchant « Hoffmann » du temps de la vie d’Offenbach, mais toujours est-il que le 18 mai 1879, une soirée-concert donnée chez lui, propose neuf extraits finalisés.

 

Le 5 octobre 1880, Offenbach s’éteint, léguant, épars, un certain nombre de morceaux de partition. Pour la création, c’est le musicien Ernest Guiraud qui s’attache à réaliser un travail remarquable afin de présenter une version orchestrée sur la base des matériaux laissés par Offenbach.

 

Parmi les vicissitudes rencontrées, la quête d’un théâtre, pour jouer l’œuvre du vivant du compositeur, ne fut pas des moindres, mais, du Théâtre de la Gaîté (qu’Offenbach dirige de 1873 à 1875) initialement prévu, elle atterrira finalement sur la scène de l’Opéra-Comique, dirigée par Leon Carvalho qui, pour la création posthume le 10 février 1881, va prendre l’initiative d’amputer sérieusement la partition.

 

Dans la foulée, le 7 décembre, et conformément aux souhaits d’Offenbach, elle parvient au Ringtheater de Vienne, ce qui ne devait pas plaire aux incarnations du Diable présentes dans le livret, car le théâtre disparaîtra dans les flammes entraînant avec lui plusieurs centaines de victimes…

 

L’histoire des représentations et enregistrements futurs verra ensuite alterner de véritables travaux musicologiques appuyés sur les découvertes successives de notes et partitions (il en existe encore !), avec des entreprises beaucoup plus contestables qui, parfois, défigurent le chef-d’œuvre offenbachien.  À ce jour, l’on considère (pas toujours avec consensus) que les grandes versions sont celles des éditions Choudens, de Fritz Oeser (contestée) et, plus récemment, celle de Michel Kaye et de Jean-Christophe Keck.

 

La version retenue à Liège est (forcément) incomplète, mais absolument passionnante

 

Si le prologue et les actes d’Olympia donnés à l’Opéra Royal de Wallonie sont, malgré quelques coupures non préjudiciables, plutôt conformes à la version Choudens avec sa formidable efficacité, l’acte de Giulietta et l’épilogue, en l’absence de référentiel vraiment fixe, nous offrent une construction qui combine les versions Choudens et Kaye-Keck.

 

La version n’est certes pas parfaite du fait de certains passages éludés qui rendent l’histoire bancale, mais elle est globalement satisfaisante, au regard d’autres versions actuellement encore données (dont celle de l’Opéra de Paris !).

Il faut préciser qu’à quelques exceptions près, si ce sont les seconds rôles qui font les frais des coupures, les grands airs des principaux protagonistes sont, en grande partie, conservés ce qui renforce l’admiration que nous avons pu avoir pour le ténor et la soprano très sollicités et rudement mis à l’épreuve.

Des solistes magnifiques et en phase

 

Arturo Chacón-Cruz (qui a remplacé Celso Albelo) est un Hoffmann à la voix tendue qui s’offre le luxe de n’avoir aucun moment de faiblesse à partir de l’emblématique légende de Kleinzach (certes pas anthologique) à l’acte I. D’emblée, les aigus sont sûrs, et parfaitement projetés (et ils le resteront jusqu’à la fin, prenant, en outre, des colorations agressives dans les couplets de Kleinzach de la toute fin).

Il sait, à tout moment, combiner leur puissance avec la sensibilité qui effleure chez Hoffmann (Quel beauté que ce « Il suffit d’un regard pour embrasser les cieux ! » dans l’acte d’Olympia).

 

Fort de sa très belle prononciation (même s’il ouvre parfois exagérément ses voyelles), il émaille son « Ange du ciel ! Est-ce bien toi ? Est-ce bien toi ?» d’autres superbes aigus longuement tenus et délivre un fabuleux « Ah ! Vivre deux, n’avoir qu’une même espérance ! ».

Les sons savent aussi se faire douloureux lorsqu’à la fin de l’acte d’Olympia, il assiste au démembrement de la poupée et qu’il n’hésite pas, le cas échéant, à émettre de véritables hurlements alors que ses amours disparaissent l’une après l’autre.

Au début de l’acte III, il offre des couplets bachiques enflammés « L’amour dans le bruit et le vin » et l’éprouvant « Ô Dieu de quelle ivresse », à la tessiture excessivement tendue, est, à nouveau, étonnant d’une santé vocale toujours éclatante.

Mais le festival ne s’achève pas là puisque suit le magnifique air et septuor « Hélas ! Mon cœur s’égare encore ! ». Enfin, c’est avec une rage ironique hors du commun qu’il livre, en épilogue, les derniers couplets de Kleinzach. Au final, Chacón-Cruz aura donné, de bout en bout, une interprétation extraordinaire – voire anthologique – sans aucune faiblesse et avec un lyrisme accompli.

Jessica Pratt assure crânement les trois rôles d’Olympia, Antonia et Giulietta. Pratt est fondamentalement une interprète belcantiste (en admettant que le belcanto aille de Rossini à Donizetti) ; elle n’est ni une soprano légère ce qui lui permettrait d’interpréter sereinement le rôle de la poupée, ni une soprano lyrique propre à celui d’Antonia.

Paradoxalement ce soir, c’est dans l’acte de Giulietta, d’ordinaire dévolu à une soprano dramatique, qu’on la trouve le plus à son aise (mais aussi parce que la version ici retenue, contient le grand air écrit pour la colorature Adèle Isaac).

 

Ainsi, oui, l’on peut être critique sur l’air d’Olympia dont la folie fait légèrement défaut, car la voix est, désormais, un peu lourde, que quelques vocalises sont savonnées et que quelques notes piquées passent à la trappe. On peut également lui reprocher un manque de médium dans l’acte d’Antonia au moment de la romance « Elle a fui la tourterelle ».

Mais… au bout du compte, et dans chaque acte, Jessica Pratt fait preuve d’un engagement hors du commun. Dès le duo « C’est une chanson d’amour qui s’envole… », elle met à vif les affres et la résolution d’Antonia, déploie des nuances merveilleuses qu’elle couronne de sublimes aigus.

Pratt mène ensuite la grande et éprouvante scène dans laquelle elle semble se consumer autant qu’Antonia, trouvant encore l’énergie pour la conclure d’un éblouissant contre-ut. Puis au moment de mourir, elle dispense des notes filées fabuleuses suivies d’un admirable et long trille.

 

C’est cependant dans l’acte III que Jessica Pratt donne probablement son meilleur, d’une part évidemment dans l’air virtuose (écrit pour Adèle Isaac et exhumé seulement en 1984) : « L’amour lui dit : la belle » interprété avec toutes ses difficultés, mais aussi dans tout le reste de l’acte qui reprend ici de la substance (même si, on le rappelle, il est le fruit de plusieurs compromis (notamment entre Choudens et Kaye-Keck) puisque l’on y retrouve aussi le magnifique « Scintille diamant » qui, s’il est inspiré du solo de violoncelle du Voyage dans la Lune, ne figurait pas dans la partition original des Contes).

Les duos respectifs avec Hoffmann et Dapertutto sont d’un lyrisme achevé, et l’ardeur et l’endurance avec lesquels Jessica Pratt tient tête rappellent qu’elle est une interprète de bel canto rompue aux exercices intenses.

 

C’est toujours un défi pour une soprano de tenter une version avec une seule chanteuse pour les trois rôles. Pratt aura démontré que si la synthèse reste compliquée, elle a donné, dans cette production, ce que l’on peut probablement espérer de mieux.

Dans le rôle des « Diables » (Lindorf, Coppelius, Docteur Miracle, Dapertutto), Erwin Schrott « en fait des tonnes ». Cela peut paraître contestable (voire parfois excessif), mais c’est aussi conforme à l’esprit d’Offenbach, cet infatigable et truculent compositeur d’opérette qui n’hésita jamais devant les bons mots même quand ils étaient plus que douteux.

Ainsi, Schrott s’installe-t-il à son aise chez les personnalités successives, alternant de son incroyable voix mordorée, chant magnifique, éructations diverses et voix théâtrale.

L’on a déjà été habitué à une prononciation française plus qu’« exotique » de la part de Schrott, mais celle-ci en vient à faire partie intégrante de l’artiste et de ses excès tant il semble aussi s’amuser avec notre langue et avoir plaisir à user d’un art de détourner les sons pour les rendre soit mordants, soit risibles.

 

C’est donc un festival, certes discutable, mais ces Diables ont une sacrée gueule ! En Lindorf, il dispense d’emblée un spectaculaire « Dans les rôles d’amoureux langoureux » où chaque phrase se colore à loisir. Dans le « trio des yeux », il cabotine à l’extrême et se transforme en camelot sans sacrifier la ligne de chant, alors que l’orchestre est royalement de la partie.

Dans leurs duos respectifs, Chacón-Cruz, Pratt et Schrott sont, en permanence absolument en phase. Le duo des deux hommes à l’acte I, avec son texte ironique écrit dans l’excellente veine de Barbier et d’Offenbach (« Et par où votre diablerie est-elle entrée ici ?… »), est un savoureux moment de théâtre. Puis les « méchants » de Schrott se font de plus en plus inquiétants ; il atteint son meilleur dans l’acte d’Antonia. Il mène alors le trio « Pour conjurer le danger, il faut le reconnaître », fort bien accompagné par Chacón-Cruz et Luca Dall’Amico à des sommets du fantastique propre à Hoffmann.

L’acte III donne l’occasion de rappeler avec le « Scintille diamant » que Schrott est, avant tout, un artiste à la ligne de chant et à l’ambitus exceptionnels, tant ses aigus sont aussi spectaculaires que ses graves et que cet air est ici magnifique.

Dans le rôle de Nicklausse et de la muse, la mezzo-soprano Julie Boulianne interprète plutôt assez bien les airs dédiés à la Muse (« La vérité, dit-on, sortait d’un puits au premier acte) et à Nicklausse, l’excellent : « Voyez-là sous son éventail », et l’ardent « Vois sous l’archet frémissant », fort bien accompagné au violon.

Aux côtés de Jessica Pratt, alors que toutes deux sont magnifiquement escortées par l’orchestre, elle contribue aussi à une très belle Barcarolle. L’on regrettera toutefois que son français soit parfois si peu compréhensible, alors qu’elle est francophone ».

 

Dans les rôles d’Andrès, Cochenille, Frantz et Pitichinaccio – il est vrai assez victimes de coupures dans la version retenue – Vincent Ordonneau ne « donne pas le plein » de ce qu’on peut attendre dans les airs typiquement dédiés à un ténor dit « Trial ». Ce qui devrait être son moment de gloire « Jour et nuit, je me mets en quatre » tombe un peu à plat.

 

Valentin Thill campe un Spalanzani plus jeune qu’à l’accoutumée, mais non moins efficace. Les étudiants, Hermann (Samuel Namotte) et Nathanaël (Jonathan Vork) sont absolument exemplaires dans la scène de la taverne de Maître Luther, Luca Dall’Amico se tire parfaitement des rôles de Luther et surtout de Crespel, mais Roger Joakim manque trop d’entrain dans le rôle de Schlemil (lui aussi bien coupé).

 

Annoncée souffrante, Julie Bailly n’a, elle, pourtant pas failli en incarnant une mère d’Antonia à l’impact aussi important que la scène l’exige.

 

Enfin, le chœur (direction : Denis Segond) a rejoint, sans conteste, le fort degré d’intensité des solistes tant dans les scènes plutôt comiques de l’acte I que dans celles, dramatiques, de l’acte III et, bien sûr, dans un final en tous points émouvant.

Bisanti magnifie Offenbach et Poda illumine la scène

 

La direction de Giampaolo Bisanti est absolument parfaite tant elle est tendue et en phase avec la dynamique offenbachienne, mais qu’elle sait également user de ralentis lorsqu’il s’agit ménager les artistes (notamment Jessica Pratt dans l’air d’Olympia et celui de Giulietta).

La vivacité des cordes est admirable, tout comme la délicatesse de leur mariage avec le cor dans « Oui, Stella ! Trois femmes dans la même femme ! ».

Que ce soit en valse, en menuet, en polonaise, la conduite des scènes de groupe dans la maison de Spalanzani est menée, comme il le faut, à un rythme effréné, toutes cordes et percussions dehors !

 

Certes, Bisanti dispose – avec Chacón-Cruz, Pratt, Schrott – de trois interprètes d’exception qu’il mène (…ou malmène) à loisir, tout en les respectant, dans un équilibre tendu et puissant.

Mais c’est probablement dans l’acte III et les parties entre Giulietta, Hoffmann et Dapertutto qu’il mène à son apogée, la synergie entre tous (extraordinaire duo « Extase, ivresse inassouvie !) et, de fait, l’Opéra d’Offenbach à son plus haut degré de génie, dans des scènes à l’intensité stupéfiante.

Enfin, il conduit le final pour retrouver, après tant de frénésie, une immense sérénité avec le sublime quatuor : « Des cendres de ton cœur, réchauffe ton génie ».

 

Quant à la mise en scène de Stefano Poda, elle est d’abord d’une éblouissante beauté, nous donnant à voir un univers blanc dans lequel figure une multitude de répliques de célèbres œuvres sculpturales et antiques. Nous sommes alors face à un immense cabinet de curiosités qui représente, selon Poda, « l’effort d’Hoffmann pour rassembler toutes les pièces de sa vie, pour en comprendre, à travers l’art, le sens, le secret, le mystère ».

 

Le mur de fond s’ouvre parfois montrant, tour à tour, l’espace initial d‘Hoffmann avec son lit suspendu, un espace en rotation qui met le protagoniste en déséquilibre permanent comme il peut l’être en état d’ébriété, puis un immense disque lors de la scène où l’on entend la voix d’outre-tombe de la mère d’Antonia… une gondole suspendue et, enfin, un immense plateau de roulette à l’acte de Giulietta.

 

Par la suite, chaque tableau de femmes est illustré par de nombreux avatars exposés comme dans un musée de cire et chorégraphiés par un Cochenille, sorte de Karl Lagerfeld, dirigeant sa tribu de mannequins.

Une fois, ce seront les diverses « poupées » présentes dans les différents univers d’Hoffmann (comme Coppelia), une autre, la résurgence des Divas d’opéra (les Callas, Grisi, Colbran, Sutherland) et enfin, les grandes courtisanes, telles la Nana de Zola et, naturellement, Violetta.

 

Suivant un fil qui les relie tous et toutes, il nous offre des tableaux somptueux alors que les cages qui contiennent les femmes sont saisies d’une véritable chorégraphie, lorsque le quatuor de violonistes apparaît, tout de noir vêtu, plume au chapeau, ou que deux groupes de chanteurs et figurants s’affrontent au moment de la mort de Schlemil.

Quand il transforme Jessica Pratt en marionnette sans force, soumise à l’influence du Diable, il appuie sur la puissance maléfique qui pèse sur elle.

Enfin, c’est une riche idée de suggérer, au final, dans une scène surprenante, que si Hoffmann a perdu la partie face à Lindorf, le mal peut également être vaincu par l’art.

Nous avons là, la confirmation que Poda est un grand metteur en scène d’opéra, mais qu’il sait aussi rappeler l’importance du théâtre, surtout dans une pièce comme celle-ci, pièce qui est passée du véritable Hoffmann à Barbier et Carré pour devenir un chef-d’œuvre chez Offenbach pour lequel musique et action ne faisaient qu’un.  Sa production s’affirme désormais comme l’une des références à connaître.

Monter les Contes d’Hoffmann n’est jamais chose facile. Il faut d’abord une version musicale rendue satisfaisante (sinon optimale) avec l’état actuel des recherches musicologiques.

Il faut savoir rappeler le haut degré de théâtralités de l’œuvre. Il faut, évidemment, avoir un chef rompu à cette musique si singulière, testament d’un auteur qui brilla dans l’opérette au Second Empire et couchait-là sa plus grande composition. Enfin, il faut des interprètes capables de relever de nombreux défis, Hoffmann en tête avec les exigences vocales impossibles qu’il a à affronter.

 

On peut dire que ce soir, la synthèse fut impressionnante. Il ne reste alors qu’à saluer l’audace de l’Opéra de Liège, cette audace que Stefano Pace insuffle, désormais, dans sa maison, et à espérer qu’il va continuer à nous proposer de tels moments de bonheur.

De nombreux enregistrements des Contes d’Hoffmann existent et peuvent permettre à tout un chacun de découvrir la plupart des versions existantes, de celle, historique, d’André Cluytens (avec Raoul Jobin et Renée Doria) à celle de Richard Bonynge (Domingo, Sutherland, Bacquier) ou celles plus contemporaines de Sylvain Cambreling (Shicoff, van Dam, Serra, Plowright, Norman) ou de Kent Nagano (Alagna, Dessay, Vaduva, Jo, van Dam)…

 

Visuels : © J-Berger – ORW-Liège