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​Solveig (l’Attente) à l’Opéra national du Rhin – Intense soliloque musical - Compte-rendu

Créé en 2019 au festival de Bergen, Solveig (l’Attente) ouvre la saison lyrique de l’Opéra national du Rhin (que prend désormais en main Alain Perroux après la disparition subite d’ Eva Kleinitz fin mai 2019), dans le cadre d'une collaboration avec le festival Musica. Le livret en revient à Karl Ove Knausgård, écrivain norvégien devenu mondialement célèbre dans la foulée du succès de son ouvrage-fleuve Mon Combat, pour une suite de tirades dites par l’héroïne, Solveig, elle-même puisée au Peer Gynt d’Ibsen. Le texte (en norvégien) confronte les réflexions du personnage, pris entre la mort prochaine de sa mère et la naissance de son enfant. Un seul personnage et une seule soliste, à travers les introspections d’une femme qui est dans l’attente, avec ses craintes et ses espoirs.
 

© Thor Brødreskift/FiB
 
La conception de la pièce, elle, est due à Calixto Bieito, metteur en scène espagnol mondialement renommé, qui signe aussi, bien évidemment, la réalisation scénique. On assiste ainsi à une manière de mélodrame lyrique, avec texte déclamé et chanté, à partir de musiques empruntées à Grieg (de sa célèbre musique de scène pour Peer Gynt, précisément, mais aussi d’autres pages chorales et vocales du compositeur). Une œuvre neuve, pour exposer les transes d’un être solitaire et esseulé, fait « de chair et de sang » (Bieito). La mise en scène s’en tient à des images (dans la conception vidéo de Sarah Derendinger), en rapport avec les évocations oniriques du monologue, projetées sur différents grands panneaux qui enserrent les mouvements sobres de la protagoniste. Immédiatement parlant !
 
La soprano Mari Eriksmoen, elle-même venue de Norvège, délivre une claire émission dans son récit entrecoupé d’un chant bien senti, avec une gestique parcellaire assortie d’une réelle présence scénique. L’héroïne à n’en pas douter, et physiquement tout autant par son aspect à la fois juvénile et fragile. Le Chœur de l’Opéra du Rhin et l’Orchestre philharmonique de Strasbourg, l’un et l’autre également sur le plateau, la soutiennent d’interventions en parfaite phase acoustique sous la direction nette du chef, Norvégien pareillement, Eivind Gullberg Jensen. Un moment d’intériorité musicale et théâtrale, pour une heure et quart d’un spectacle qui ne lâche pas l’auditeur.
 
Pierre-René Serna

 Knausgård /Grieg : Solveig (l’Attente) : Opéra de Strasbourg – 20 septembre ; prochaines représentations : 22 et 23 septembre 2020 // bit.ly/2HeH3c6
 
Photo © Thor Brødreskift/FiB

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