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Au Capitole de Toulouse, les sacrées voix de Parsifal

Au Capitole de Toulouse, les sacrées voix de Parsifal

Parsifal, la grande messe lyrique de Wagner étant à l’affiche de deux grandes maisons d’Opéras en France, le choix du mélomane sera guidé par les chanteurs. Et si la distribution du Capitole de Toulouse était la meilleure du monde ? Eléments de réponse...

© Cosimo Mirco Magliocca

© Cosimo Mirco Magliocca

Pour monter une nouvelle production de Parsifal, une maison d’opéra doit avoir de sérieux atouts. Le festival scénique sacré de Wagner réclame un orchestre, des chœurs et un plateau vocal de tout premier ordre pour relever le défi de plus de cinq heures d’une musique grandiose. Hasard du calendrier, il n’est toutefois pas étonnant qu’en France, l’œuvre soit simultanément à l’affiche de l’Opéra National du Rhin et surtout du Théâtre du Capitole de Toulouse. Ce 28 janvier 2020, la grande institution midi-pyrénéenne a levé le rideau sur la nouvelle mise en scène d’Aurélien Bory avec une remarquable affiche qui a réservé quelques surprises.

Sacrés musiciens

Il ne surprendra pas que l’Orchestre national du Capitole, l’une des plus belles formations de l’Hexagone reçoive une couronne d’éloges. De bout en bout admirables, les musiciens investis dans une parfaite cohésion ont fait briller tous les pupitres avec un luxe de sonorités quasi orgiaque. Frank Beermann à la direction musicale est quant à lui, une révélation. Encore en poste récemment au Theater Chemnitz mais peu connu de l’autre côté du Rhin, le chef allemand est pourtant un spécialiste du répertoire wagnérien (il vient de diriger un Ring dans l’improbable petite ville de Minden). Sa lecture vibrante de Parsifal est d’une saine fidélité qui ne l’empêche pas de surprendre dans des déferlements orchestraux bienvenus. Très attentif aux solistes, jamais il ne couvre les voix, un exploit lorsque l’on a à sa disposition la Rolls-Royce des orchestres. Le Chœur et la Maîtrise du Capitole et le Chœur de l'Opéra national de Montpellier-Occitanie roulent dans la même catégorie offrant un dialogue à égal avec les solistes lors de moments de pure beauté.

Le sacre de Dame Nature ?

© Cosimo Mirco Magliocca

© Cosimo Mirco Magliocca

Après la parfaite réussite de son Orphée et Eurydice de Gluck à l’Opéra Comique, la nouvelle production lyrique très attendue d’Aurélien Bory ne suscite pas le même enthousiasme. Dans Parsifal, le metteur en scène cherche le ton juste avec des images d’une beauté inégale. En ouverture de rideau, l’atmosphère mystérieuse qui se dégage est vite polluée par un ballet de douze néons formant des runes (ou une écriture cunéiforme ou des signes mathématiques ou rien !) qui laisse perplexe. Alors qu’il est question d’enchantement du vendredi Saint, Bory propose une messe païenne esthétisante à la gloire de la Nature où tout aspect christique est gommé. Cette vision pourrait emporter l’adhésion si elle était nourrie davantage. Il est difficile en effet de trouver des qualités au treillis couvert de feuillage comme décor, même éclairé avec science par Arno Veyrat. Ainsi, l’annonce de l’apparition du Graal dans un beau scintillement de lumière commence par séduire puis fait flop car il ne se passe rien d’autre sur scène. Le dépouillement convient mieux au deuxième acte où le ballet des filles-fleurs est plutôt réussi comme l’affrontement Kundry Parsifal qui offre un vrai moment de théâtre fait de chair et de sang.

Des rôles sacrement investis

© Cosimo Mirco Magliocca

© Cosimo Mirco Magliocca

Alors qu’elle aborde le rôle pour la toute première fois sur scène, Sophie Koch est l’évidence même dans Kundry. Avec une voix souveraine, puissante, impressionnante dans les aigus et même dans les raucités, elle offre une prestation inoubliable qui confirme sa place parmi les plus grandes interprètes wagnériennes actuelles. Il est heureux de retrouver Nikolai Schukoff au meilleur de sa forme. Son Parsifal ne s’embarrasse pas toujours de nuances mais en chantant forte, le ténor s’assure une stabilité et des aigus dardés toujours justes et souvent impressionnants. Peter Rose est un Gurnemanz bon conteur à qui il manque toutefois une petite dimension pour habiter complètement le personnage. Le Théâtre du Capitole a réalisé un sans-faute avec une distribution remarquable où même les rôles secondaires sont attribués à des chanteurs tels Adèle Charvet et Juliette Mars (filles-fleurs) ou Enguerrand de Hys (Troisième Ecuyer). Convaincants, Pierre-Yves Pruvot campe un Klingsor noir et aboyant tandis que Julien Véronèse est pour une fois, un Titurel jeune qui fait entendre toutes les notes. Les mélomanes connaissent la valeur d’une voix comme celle du baryton Matthias Goerne, incroyable Liedersänger. A Amfortas, il apporte une science absolue du mot et de la couleur mais jamais l’on n’avait vu l’artiste sortir comme ici de sa réserve et donner autant de chair à un personnage, son meilleur rôle sur scène.

Malgré une mise en scène que l’on aurait aimée plus spectaculaire, le Parsifal du Capitole restera longtemps dans les mémoires grâce aux chanteurs exceptionnels, un festival scénique de sacrées voix !

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