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Cinquante nuances de noir

Antwerp
Opera Vlaanderen
02/12/2016 -  et 14*, 17, 19, 21, 23, 25 février (Antwerpen), 5, 8, 10, 13, 15 mars (Gent) 2016
Giuseppe Verdi: Otello
Ian Storey (Otello), Corinne Winters (Desdemona), Vladimir Stoyanov (Iago), Adam Smith (Cassio), Kai Rüütel (Emilia), Stephan Adriaens (Roderigo), Leonard Bernad (Lodovico), Patrick Cromheeke (Montano/Araldo)
Koor Opera Vlaanderen, Jan Schweiger (chef des chœurs), Symphonisch Orkest Opera Vlaanderen, Alexander Joel (direction)
Michael Thalheimer (mise en scène), Henrik Ahr (décors), Michaela Barth (costumes), Stefan Bolliger (lumières)


(© Annemie Augustijns)


Il ne faudrait pas qu’Opera Vlaanderen pense à chaque fois à Michael Thalheimer pour Verdi. Il y a quatre ans, le metteur en scène a imaginé, pour La Force du destin, une scénographie très simple dans laquelle le noir dominait. Il reprend le même principe, aujourd’hui, pour Otello (1887) mais dans un dépouillement encore plus extrême, le mouchoir et la robe de mariée étant les seuls accessoires de ce dispositif constitué d’une mosaïque de panneaux ondulant ou pivotant très légèrement et qui ne laisse passer la lumière qu’à la fin. Cette couleur se retrouve jusque dans les costumes, même le marcel d’Otello, au visage en partie grimé, un tulle noir recouvrant celui des choristes.


Evidemment, ce parti pris radical mais assumé incite à se concentrer sur les aspects théâtraux et musicaux de ce spectacle visuellement très cohérent, par la force des choses. La direction d’acteur s’avère, tout d’abord, vraisemblable et tendue. S’ils suscitent peu d’empathie, les personnages prennent du relief et les chanteurs habitent leur rôle, mais tout cela relève du tout-venant. Bien que le metteur en scène cerne au plus près l’enjeu du drame, La Bohème idéale de Robert Carsen, en décembre, et même l’Armida contestable de Mariame Clément, en novembre, nous intéressaient davantage.


La distribution ne suscite pas d’enthousiasme outre mesure mais personne ne démérite. Ian Storey, qui s’engage avec sincérité, ne possède pas un timbre magnétique mais sa voix se pare de teintes graves qui conviennent à Otello, rôle dans lequel il se révèle en définitive convaincant. La palette demeure cependant réduite et si le ténor britannique tient la ligne avec un minimum de noblesse, et ce jusqu’au terme du spectacle, l’émission ne parait pas toujours naturelle et homogène, la puissance venant, aussi, parfois à manquer. Corinne Winters livre, en Desdémone, une prestation en demi-teinte dans les deux premiers actes, mais plus égale dans la seconde partie, où elle se montre très probe, à défaut d’émouvoir, dans une «Chanson du saule» profondément ressentie. Cette soprano met en valeur un timbre plus séduisant que celui de son partenaire et cultive un chant élaboré – registres soudés, médium nourri, phrasés modelés. Elle incarne, en tout cas, un personnage d’une grande sobriété, assez justement composé, plus jeune fille que grande dame.


L’Iago de Vladimir Stoyanov laisse une impression mitigée: il faut saluer la solidité de la technique de ce baryton bulgare bien chantant mais il personnifie, dans cette production, un pauvre type, pas le salaud sournois que beaucoup s’imaginent. La voix manque, en outre, de mordant et l’incarnation ne paraît pas assez vénéneuse. Pour Hitchcock, plus le méchant est réussi, plus le film est réussi, ce qui s’applique aussi à l’opéra. Les comprimarii se tiennent correctement, bien que le Cassio d’Adam Smith manque d’éclat et de présence, Kai Rüütel demeurant, en fin de compte, la seule à se distinguer, parmi eux, dans le rôle d’Emilia. Les choristes, pour leur part, se montrent de nouveau persuasifs sous la conduite de Jan Schweiger.


Alexander Joel, qui descend régulièrement dans cette fosse, conserve la tension tout en dosant la puissance et en clarifiant la texture. Sous sa direction soutenue et sous contrôle, l’orchestre, précis et structuré, réserve de belles interventions solistes mais il ne se révèle pas aussi ardent que d’habitude, passant parfois outre la sensualité et la subtilité de la musique. Le public, dans cette salle, a la manie d’ovationner debout les artistes à l’issue de la représentation, ce qui se justifie rarement, encore moins dans ce cas-ci.



Sébastien Foucart

 

 

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