mardi 19 mars 2024

Compte rendu, opéra. La Traviata de Cristina Pasaroiu convainc à Nice

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Emmanuel Andrieu
Emmanuel Andrieu
Après des études d’histoire de l’art et d’archéologie à l’université de Montpellier, Emmanuel Andrieu a notamment dirigé la boutique Harmonia Mundi dans cette même ville. Aujourd’hui, il collabore avec différents sites internet consacrés à la musique classique et à l’opéra - et notamment avec ClassiqueNews.com dont il est le rédacteur en chef.

Compte-rendu, opéra. Nice, Théâtre de l’Opéra, le 17 novembre 2015. Giuseppe Verdi: La Traviata. Avec Cristina Pasaroiu (Violette Valéry), Ahlima Mhamdi (Flora Bervoix), Karine Ohanyan (Annina), Giuseppe Varano (Alfredo Germont), Vittorio Vitelli (Giorgio Germont), Frédéric Diquero (Gaston de Letorières), Thomas Dear (Baron Douphol), Luciano Montanaro (Marquis d’Obigny), Mattia Denti (Docteur Grenvil). Pascale-Sabine Chevroton (mise en scène). Philippe Auguin (direction musicale).

Signée par son ancien directeur Marc Adam (dont le contrat – à notre grande déception au vu de sa passionnante autant qu’ambitieuse programmation la saison dernière – n’a pas été renouvelé par la Mairie), la saison niçoise s’ouvre avec une valeur sûre: La Traviata de Giuseppe Verdi. Confiée à Pascale-Sabine Chevroton, chorégraphe et metteure en scène qui a surtout œuvré dans les pays germaniques – la production nous a déçu, et a été sanctionnée bruyamment par le public tant de la première que celui de la dernière à laquelle nous avons assisté. Car qu’y voit-on à part des clichés, des poncifs éculés, des principes scéniques rebattus, vus mille fois ici ou là. Cela commence par une énième mise en abîme du théâtre dans le théâtre, où un chœur voyeur assiste à la déchéance de l’héroïne depuis les loges d’une salle d’opéra reconstituée. Que penser aussi de la projection vidéo, en fond de scène, d’une mer houleuse et d’un ciel menaçant qui, s’il pourrait faire sens dans Otello, n’a nul rapport avec l’histoire de la courtisane et ne fait que dénoter une carence d’imagination. Quant aux costumes de Katharina Gault, qui mêlent allègrement toutes les époques et tous les styles, ils sont pour la plupart très laids.

 

 

 

Clichés, laideur, imagination en berne… heureusement s’affirme

La Traviata de Cristina Pasaroiu

pasaroiu cristina soprano traviata opera de nice review compte rendu critique classiquenews novembre 2015Après son éclatant succès in loco dans le rôle de Rachel (La Juive de Halévy) au printemps dernier (compte rendu opéra : La Juive de Halévy à l’Opéra de Nice avec Cristina Pasaroiu, mai 2015), Cristina Pasaroiu enthousiasme dans celui de Violetta Valéry. Dotée d’un timbre ample, corsée et rond à la fois, la soprano roumaine dispose d’un métier déjà très sûr (elle n’a que 30 ans!). Le premier acte ne met en péril ni son émission, homogène et libre dans le registre aigu (magnifique «Sempre libera» couronné par un contre-mi bémol), ni une vocalisation aussi impeccable que superbement projetée. L’évolution du personnage, de l’étourdissement passionnel à l’abattement et à la déréliction, du renoncement à l’amour jusqu’à la douleur et la mort, s’avère bouleversant de vérité dramatique. Les accents toujours justes de la cantatrice trouvent à se déployer dans les grands moments de ferveur, comme dans «Amami Alfredo», poignant en terme de puissance émotionnelle. Tout ce qui est écrit piano legato est également chanté avec un superbe raffinement tel le «Dite alla giovine», aux piani divinement dosés. Enfin, les colorations du «Addio del passato» sont remarquables de variété, et concourent à rendre très émouvante la mort de la phtisique, vécue ici de l’intérieur.

Nous serons moins disert sur le ténor italien Giuseppe Varano, dont la séduction vocale et scénique frôle le néant. Que doit-on lui reprocher le plus entre un timbre grisâtre, un registre aigu chevrotant et court, une projection vocale limitée ou encore une présence en scène morne et plate…?

C’est heureusement un tout autre bonheur que distille le chant du formidable baryton italien Vittorio Vitelli (dans le rôle de Germont père), qui subjugue tant par sa ligne de chant que par son legato exemplaires, ainsi que par son phrasé et sa musicalité hors pairs, sa prodigieuse palette de couleurs, autant de qualités qui, dans le fameux air «Di Provenza il mar», procurent à l’auditoire un intense frisson. Enfin, l’acteur n’enthousiasme pas moins par sa noble stature et sa présence saisissante.

Quant aux comprimari, ils s’avèrent efficaces, à commencer par la Flora d’Ahlima Mhamdi, l’Annina de Karine Ohanyan ou encore le Baron Douphol de Thomas Dear.

Malgré une carence de dynamisme au premier acte, le directeur musical «maison», Philippe Auguin mène ensuite fort bien le reste de la partition, soucieux de trouver des couleurs et des tempi aussi fluctuants que les situations du drame, par ailleurs très bien suivi par un Orchestre Philharmonique de Nice en belle forme et par un Chœur de l’Opéra de Nice impeccable.

Compte-rendu, opéra. Nice, Théâtre de l’Opéra, le 17 novembre 2015. Giuseppe Verdi: La Traviata. Avec Cristina Pasaroiu (Violette Valéry), Ahlima Mhamdi (Flora Bervoix), Karine Ohanyan (Annina), Giuseppe Varano (Alfredo Germont), Vittorio Vitelli (Giorgio Germont), Frédéric Diquero (Gaston de Letorières), Thomas Dear (Baron Douphol), Luciano Montanaro (Marquis d’Obigny), Mattia Denti (Docteur Grenvil). Pascale-Sabine Chevroton (mise en scène). Philippe Auguin (direction musicale).

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