Ivan Törsz face à Fidelio

Présenté à la presse par Marc Clémeur en janvier 2002, Ivan Törsz (prononcez Teurrj) en est déjà à sa première production `officielle´ en tant que chef d'orchestre principal de l'Opéra Flamand. Lors de la conférence de présentation, il avait, non sans humour, exprimé un regret: celui de devoir renoncer à diriger Mozart, dans la mesure où Clémeur préfère réserver ce dernier aux spécialistes.

MARTINE DUMONT-MERGEAY

ENTRETIEN

Présenté à la presse par Marc Clémeur en janvier 2002, Ivan Törsz (prononcez Teurrj) en est déjà à sa première production `officielle´ en tant que chef d'orchestre principal de l'Opéra Flamand. Lors de la conférence de présentation, il avait, non sans humour, exprimé un regret: celui de devoir renoncer à diriger Mozart, dans la mesure où Clémeur préfère réserver ce dernier aux spécialistes. C'est pourtant avec le grand frère de Mozart, Beethoven, et son unique opéra, `Fidelio´, qu'il inaugure sa fonction. Rencontre.

Entre la classicisme et le romantisme, quelle forme avez-vous privilégié pour cette oeuvre charnière?

Cette question - centrale - porte d'abord sur le choix entre le lyrique et le symphonique : faire de l'opéra symphonique est toujours un désastre SAUF pour `Fidelio´ où la dimension symphonique revêt une fonction véritablement structurelle, novatrice, fondatrice du langage du XIXe siècle. Elle touche ensuite à la question du style : car comment passer de la première scène, menée sur le ton du singspiel très XVIIIe entre Marcelline et Jacquino, au grand solo de Florestan, typique du langage XIXe, et surtout à la fin du 2e acte, marqué par le romantisme issu de la révolution et visant toute l'humanité. Je cherche donc à montrer, par l'évolution du style, comment d'une petite pousse peut jaillir quelque chose de cosmique, comment une scène innocente peut conduire à des développements insoupçonnés, universels, dénonçant la dictature, touchant à l'amour et à la liberté.

Avez-vous traduit cela concrètement?

J'ai effectivement choisi une `astuce´ pour souligner la progression du style mozartien de la jeunesse, vers le style de la maturité, celui de la IXe symphonie ou de la Missa Solemnis: l'action commence avec des cordes réduites (8 premiers violons etc. les vents ne changent pas) pour en arriver au effectifs complets au début du 2e acte.

Les réactions de l'orchestre?

Avec mon humour de Newyorkais, je dirais: personne ne m'a mordu...

Quels furent vos critères dans le choix de la distribution?

La plupart des chanteurs étaient déjà engagés à ma nomination mais j'entérine les choix de Clemeur. Je suis surtout heureux que - outre des `grandes´ voix - tous les chanteurs aient l'allemand comme langue maternelle : dans les bons opéras (ce qui est le cas ici), les paroles sont aussi importantes que la musique, sans compter les dialogues parlés.

Après la `Dame de Pique´ qui, la saison dernière, vous a révélé au public du VLOS, `Fidelio´ est votre première en Belgique. Quels sont vos autres rendez-vous?

Par contrat, je me suis engagé à diriger au moins deux productions et trois concerts par saison (prochaine production: `La Traviata´, de Verdi, en juin 2003), ce qui me permet de rester une partie du temps à Hambourg où je me suis installé avec ma famille. Mais je vis ici lorsque je suis en production, je veux m'intégrer à Anvers, ne pas me sentir étranger, parler le néerlandais, ce à quoi je travaille selon ma méthode habituelle, avec des livres et des cassettes (jusqu'ici, ça a bien marché: Ivan Törsz, Américain d'origine hongroise, parle couramment neuf langues...).

Vous venez de l'Opéra de Schwerin, où, en tant que General Music Director, vous aviez tout à dire. Quel est votre objectif à Anvers?

J'ai appris énormément à Schwerin, mais le travail y était devenu prioritairement administratif et financier, je n'avais même plus le temps de pratiquer le piano - alors que j'étais, dans le temps, ce qu'on appelle un bon pianiste (rires) -; ici, je renoue avec mon métier de musicien, avec un magnifique objectif en point de mire : le `Ring´, probablement en 2005.

Votre projet avec l'orchestre?

Cultiver les idéaux classique me semble toujours la meilleure façon de progresser: je compte travailler Haydn (mais pas ses opéras ni ceux de Schubert, quand j'en entends, je m'encours en criant) et Mozart, école irremplaçable pour la transparence, l'intonation, la précision la flexibilité. Des qualités fondamentales, pour tous les répertoires.

© La Libre Belgique 2002


Au VLOS à Anvers: `Fidelio´ de Beethoven - à partir du 30 octobre - 03/ 202 10 11 -

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