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​La Damnation de Faust sous la direction de Cristian Măcelaru – Convaincante entrée en matière – Compte-rendu

L’Orchestre national de France célèbre son « Jubilé », ou les 90 ans de cette formation attachée à Radio France.(1) Pour l’occasion, cinq concerts commémoratifs sont prévus, axés comme il se doit sur la musique française. La Damnation de Faust ouvrait le ban au Théâtre des Champs-Élysées, avec Cristian Măcelaru – chef titulaire et directeur depuis 2020 – à la baguette, comme ce sera le cas pour les quatre rendez-vous à suivre.
 

© Christophe Abramowitz / Radio France
 
Berlioz et notamment sa Damnation appartiennent bien au registre de l’orchestre, depuis Markevitch, Colin Davis lui-même ou Charles Dutoit, entre autres. C’est donc une entrée en matière de circonstance où l’on attendait Măcelaru dans ce répertoire. Il avait déjà dirigé il y a peu la Symphonie fantastique, le 19 janvier dernier, où il avait laissé une bonne impression. Il ne faillit pas pour la Damnation, devant un orchestre bien mené et enlevé, notamment les cordes, premiers et seconds violons répartis de part et d’autre du plateau (comme à l’époque, mettant en relief leurs interventions). On peut regretter certains détails, ainsi une Marche hongroise précipitée sur sa fin selon les mauvaises habitudes, mais l’ensemble répond bien à sa mission dans cette œuvre aux effets constamment variés. Le chœur de Radio France, préparé par Josep Vila i Casañas, s’ajoute en phase et d’une juste participation pour ses parties qu’il maîtrise depuis presque toujours (et récemment lors du Festival Berlioz de La Côte Saint-André en 2023) (2).

La distribution vocale est une autre question. Deux des chanteurs initialement prévus, Stanislas de Barbeyrac et Jean Teitgen, ont été remplacés. Avec des fortunes diverses. Paul Gay s’empare de Méphistophélès avec une projection ardemment soutenue, davantage toutefois dans les passages de déclamation que dans ses airs. On ne semble pas avoir perdu au change dans son cas. Mais Faust échoit à un ténor de bien petit format, John Irvin, d’un faible volume et d’un timbre terne. Malgré ces moyens limités, il n’en manifeste pas moins un réel engagement et une bonne élocution pour un chanteur anglophone. Frédéric Caton est de son côté un efficace épisodique Brander. Tout juste sortie d’une remarquable Heure espagnole à la salle Favart, Stéphanie d'Oustrac, resplendit pour Marguerite, rôle qu’elle avait inauguré avec éclat l’an dernier au Festival Berlioz, entre large phrasé et sentiment éminemment expressif. Le public, particulièrement attentif et sans applaudissements intempestifs, réserve un triomphe final en grande partie bien mérité.
 

Pierre-René Serna
 

 
(1) Né Orchestre national de la Radiodiffusion française en janvier 1924, il est devenu Orchestre national de l’ORTF en 1964 et porte depuis 1974 le nom d’Orchestre national de France.
 
(2) www.concertclassic.com/article/la-damnation-de-faust-au-festival-berlioz-2023-accomplissement-compte-rendu
 
Paris, Théâtre des Champs-Élysées, 21 mars 2024.
 
Photo © Christophe Abramowitz / Radio France

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