A Paris, des “Pêcheurs de perles” en bonnes eaux

- Publié le 6 mars 2024 à 10:09
Les Pêcheurs de perles de Bizet
Le Théâtre des Champs-Elysées a fait salle comble pour cette version de concert du chef-d'œuvre de Bizet, proposée en coproduction avec Les Grandes Voix, sous la direction de Lorenzo Passerini.

Avouons-le : sans mise en scène, et seulement quelques effets de mise en espace anecdotiques, l’intérêt dramatique de l’œuvre est à peu près nul. Mais qu’importe ! Cette version de concert nous permet une fois encore de nous concentrer sur l’essentiel : la musique.

On est avant tout sous le charme d’un Zurga de grande classe, le Canadien Joshua Hopkins, baryton riche et corsé, à la projection impeccable, possédant en outre un beau potentiel émotionnel – un peu raide au début, il se révèlera très touchant au finale. Mais, à l’applaudimètre, le vainqueur est l’Américain Jonah Hoskins, charmant ténor à l’émission ronde et chaleureuse, chantant sa romance avec aisance et fluidité, parvenant à s’imposer dans les passages un peu plus larges bien que la voix reste celle d’un lyrique léger. Si le soprano de Leila de Sandra Hamaoui est plus puissant, il séduit beaucoup moins : quelques beaux aigus filés ne compensent par un timbre strident et acide, ni une prononciation déficiente. Sans posséder la basse requise pour  un grand prêtre, Matthieu Lécroart campe de son côté un de Nourabad correct et d’une belle présence.

Tempos rapides

On reste en revanche dubitatif devant la prestation du Chœur de chambre de Rouen dont le son, bien étique, manque sérieusement d’épaisseur, de générosité et même de graves, ne rendant pas justice à la partition (rarement a-t-on entendu « lalala » aussi ridicules !). Bien préparée par Frédéric Pineau et quitte à forcer un peu, la formation fait cependant preuve d’endurance dans un ouvrage qui la sollicite beaucoup, sans se laisser décontenancer par des tempos extrêmement rapides.

Car il faut dire que Lorenzo Passerini a la baguette pour le moins dynamique, voire même un peu trop agitée par instant, notamment dans le grand air de Zurga, qui aurait mérité un peu plus de rubato. Cette vivacité, parfois déstabilisante pour les artistes, a toutefois le mérite de maintenir la tension : on apprécie qu’après un premier acte un peu statique, le chef lâche les chevaux, notamment dans un finale de l’acte II assez saisissant. Ainsi aiguillonné, l’Orchestre de chambre de Paris excelle, avec une pâte lumineuse et aérée qui met bien en valeur toutes les subtilités de la partition.

Les Pêcheurs de Perles de Bizet. Paris, Théâtre des Champs-Elysées / Les Grandes Voix, le 4 mars.

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